Le 14 décembre 2023, une proposition de résolution sur la prolongation du congé de paternité en cas d’hospitalisation du nouveau-né a été votée au Parlement. Ce texte proposé par la députée socialiste Sophie Thémont avait déjà été voté à la quasi unanimité fin novembre en commission. L’objectif d’une telle mesure, appuyée également par le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE), est de réduire les risques pour l’enfant prématuré d’une séparation précoce avec ses parents.
Pour rappel, depuis le 1er janvier 2023, le papa a droit à 20 jours de congé de naissance au lieu des 10 jours accordés avant cette date. Mais, contrairement à la mère, le père ne peut pas encore prolonger ces congés en cas d’hospitalisation du nouveau-né (souvent liée à la prématurité). En ce qui concerne la maman, elle a droit à au moins neuf semaines de congé postnatal obligatoire. Si le nouveau-né est hospitalisé plus de sept jours, ce congé est prolongé d’une durée égale à celle de l’hospitalisation (avec un maximum de 24 semaines). Dans un souci d’égalité hommes/ femmes et surtout pour éviter tout risque pour le bébé hospitalisé, la mesure adoptée ce 14 décembre est une belle nouvelle autant pour les parents que pour le secteur périnatal.
“Nous estimons aujourd’hui qu’un pas supplémentaire devrait être franchi”
Dans les développements avancés au sein de la proposition de résolution (datée de 2022) – visant à allonger le congé de naissance pour les pères et coparents en cas d’hospitalisation du nouveau-né -, Sophie Thémont et quelques autres cosignataires du PS et de Vooruit écrivaient notamment ceci : “Alors qu’une évolution intéressante a pu être constatée dans notre pays depuis 2002 sur le fondement d’une législation clairement orientée dans le sens d’un investissement en faveur d’une meilleure qualité de vie ainsi que d’une plus grande égalité entre les parents, entre les hommes et les femmes, nous estimons aujourd’hui qu’un pas supplémentaire devrait être franchi en matière de congé lorsque le nouveau-né est hospitalisé. Comme le recommande d’ailleurs le KCE dans son rapport, nous souhaitons aujourd’hui prolonger le congé de naissance pour les pères et les coparents dont l’enfant nouveau-né est hospitalisé à la naissance, comme cela est déjà prévu concernant le congé de maternité en cas d’hospitalisation prolongée du nouveau-né.”
12% d’hospitalisation à la naissance
La naissance d’un enfant est souvent attendue avec grande impatience. Grossesse et accouchement se déroulent dans la majorité des cas sans problème majeur. Malheureusement, dans certains cas, tout ne se déroule pas comme prévu. Comme le mentionne le KCE dans la préface de son récent rapport intitulé “Les soins de développement centrés sur l’enfant prématuré et sa famille en néonatologie”, publié le 22 mars 2022, “Beaucoup de bébés doivent passer par la case néonatologie, parfois pour très peu de temps, mais souvent aussi pour de longues périodes qui peuvent se compter en semaines, voire en mois.” Toujours selon le KCE : “En Belgique, on compte environ 120.000 naissances par an dont 12 % nécessitent une hospitalisation dans des services de néonatologie et 4 % (donc un tiers) dans des unités de néonatologie intensive (NIC). La plupart de ces nouveau-nés sont des prématurés, c’est-à-dire des nouveau-nés dont l’âge gestationnel est < 37 semaines (8 % des naissances en 2020).” Les résultats du rapport précité devraient aider les autorités de santé, le secteur des hôpitaux et les professionnels des soins à fixer des priorités et à prendre des décisions stratégiques concernant l’implémentation des soins IFCDC (Infant- and familycentred developmental care) dans les soins néonatals en Belgique.
Les dégâts d’une séparation précoce avec les parents
Parmi les éléments mis en lumière par le Centre fédéral d’expertise des soins de santé, il apparaît que la séparation du nouveau-né prématuré et de ses parents peut avoir des conséquences à long terme et doit être évitée autant que possible. Ainsi, le KCE estime qu’ il est “impératif que tout soit mis en place pour que le nouveau-né trouve les réponses adéquates à ses besoins d’attachement qui lui serviront de base de sécurité pour son développement. Cela implique que ses parents soient en mesure de lui offrir proximité, tendresse et réconfort.” Parmi les obstacles à la disponibilité des parents pouvant aggraver la séparation, le KCE pointe notamment la durée du congé de paternité – de naissance.
Pour un meilleur équilibre entre vie quotidienne et visites à l’hôpital
Comme le mentionne le KCE, “Les parents dont le nouveau-né prématuré est hospitalisé ont du mal à maintenir un équilibre entre leur vie quotidienne et les visites à l’hôpital. Ce problème est particulièrement aigu pour les pères/coparents. En effet, le congé de paternité ou de naissance est beaucoup plus court que le congé de maternité et ne donne pas droit à une prolongation en cas d’hospitalisation du nouveau-né. La plupart des coparents interrogés ont dû reprendre le travail avant que l’enfant ne quitte l’hôpital, ce qui les a conduits à devoir jongler entre la gestion du ménage, les soins aux frères et sœurs et les déplacements entre le domicile et l’hôpital. Ils estiment que l’épuisement physique et mental qui en a résulté les a empêchés de participer aux soins quotidiens de l’enfant, tandis que les mères se sont senties seules pour s’en occuper. Certains pères interrogés ont fait état de conséquences à long terme sur leur santé (mentale) après avoir tenté de concilier travail et vie de famille pendant l’hospitalisation de leur enfant prématuré.