Bruxelles compte près de 68.000 familles monoparentales dont 86% sont des mamans solos. 1 enfant sur 3 grandit dans cette réalité. Pour ces familles, trouver un équilibre n’est pas toujours simple puisqu’il faut faire face, seules, à différentes difficultés : logement, emploi, finances. Pour joindre les deux bouts, les mamans solos peuvent compter sur différentes aides ; mais comment s’y retrouver ? Pour en savoir plus, l’équipe de Born in Brussels a tout récemment participé à une rencontre avec des acteurs et actrices du secteur associatif et du monde politique.
Un précédent article intitulé “Monoparentalité : un reportage en soutien aux mamans-solos !”, illustrait déjà une réalité complexe bien présente au sein de notre pays. Deux associations y sont mises en avant : La maison des parents solos et Co-fa-mon ; toutes deux très actives dans le soutien aux mamans-solos à Bruxelles et en Wallonie. Car ces mères, souvent isolées, doivent se faire entendre pour que leurs revendications aboutissent enfin. Place donc à la parole des principales concernées, dont les situations nous concernent tous !
Je suis devenue maman solo par choix puisque j’ai fait une PMA (Procréation Médicalement Assistée) pour tomber enceinte. J’étais à l’époque célibataire et j’approchais de la 40ène. Je me voyais mal entreprendre une nouvelle relation, car il faut du temps pour aborder le sujet. Cela ne m’a pas fait peur, car je savais que je voulais cet enfant et que je n’étais pas la seule femme à vouloir réaliser ce projet. Lorsqu’Elliot est né, tout s’est bien passé car il faisait ses nuits et j’avais du temps pour moi et mon travail. C’est la venue du Covid qui a tout chamboulé. J’ai commencé à fatiguer et je n’avais plus la possibilité de me ressourcer en extérieur comme j’aimais le faire auparavant. À ce moment-là, il me manquait un relais pour prendre en charge mon fils. D’une certaine manière cela m’a aidé puisque j’ai été obligée de demander de l’aide. Je ne l’aurais pas fait en temps normal car c’était mon choix d’avoir un enfant seule et d’en assumer la responsabilité. Depuis lors, je vais mieux et j’ai gardé cette habitude de me tourner vers d’autres mamans lorsque j’ai besoin d’une nuit ou d’un moment pour moi.” Témoignage de Stéphanie, maman solo, à écouter ici dans son intégralité.
Les mamans solos prennent la parole !
Le 3 décembre dernier, ces mamans qui gèrent tout toutes seules étaient à l’honneur lors de l’événement « Les mamans solos prennent la parole » Il s’agissait de l’étape finale du projet Monopédia. Financé par la Fédération Wallonie-Bruxelles et porté par Pour la Solidarité, il a été lancé en février 2024 (pour une durée fixe d’un an) afin de lutter contre le non-recours aux droits des familles monoparentales en Belgique. En effet, le non-recours se produit lorsque des personnes, ici les mamans solos, ne réclament pas les droits sociaux auxquels elles ont droit, souvent par manque d’information ou de moyens pour faire les démarches nécessaires.
Co-construite par des mamans solos, cette dernière rencontre (cinq autres ateliers ont eu lieu en amont) était donc l’occasion pour elles de partager la réalité de leur quotidien et de présenter l’outil qu’elles ont développé au cours de toutes ces réunions : un répertoire reprenant des lieux essentiels en matière de culture, enseignement et sport (disponible en janvier prochain). Durant les précédents ateliers, il était question de sonder le secteur, et surtout les mamans solos elles-mêmes, lors de moments de partages, de moments artistiques, de moments de co-construction de ce répertoire d’acteurs, de moments de discussions au micro du podcast Paroles de Daronnes… Mais avant cela, un tour d’horizon des professionnels du secteur a eu lieu, pour évoquer différents projets d’aide aux familles monoparentales (tous repris plus bas dans l’article). Des personnalités politiques ont également pu prendre la parole et rassurer l’assemblée sur les évolutions possibles dans les années à venir.
À quand une vraie prise de conscience au niveau politique ?
Au cours de la rencontre de Monopédia, la modératrice déplorait que la réalité des familles monoparentales semble avoir été oubliée des pouvoirs publics ; à l’exception, peut-être de la campagne « Parents solos, mais pas seuls ». Dans le public, une députée et maman solo, Marie-Claire Mvumbi, a tenu à rectifier : « J’ai été élue pour représenter les mamans solos en tant que sénatrice. Ils m’ont appelée pour porter cette voix parce que je suis moi-même maman solo et que j’ai créé une association appelée COFAMON (à Liège). Comme je ne trouvais aucune aide, surtout pour rompre mon isolement, j’ai décidé de développer mon propre projet. Maintenant que je suis députée, je vais enfin pouvoir faire remonter nos revendications aux décideurs politiques. » Elle a ensuite exposé quelques exemples de revendications véhiculées au travers d’une pétition et d’un mémorandum : lutter contre les inégalités sociales, permettre la discrimination positive (pour l’emploi, pour l’accès aux logements sociaux…), faire en sorte d’automatiser les procédures (pour l’accès au statut BIM, pour l’augmentation des allocations familiales…), etc.
Autre personnalité politique présente lors de la rencontre : Myriem Amrani, présidente du CPAS de Saint-Gilles. Elle est également assez positive sur l’évolution de la cause des familles monoparentales. Au CPAS, ils accompagnent ces personnes au logement, à la santé mentale et physique, à l’emploi et la formation, à la médiation de dettes (20% du public)… Le projet MIRIAM, qu’elle soutient fermement aux côtés de la ministre Karine Lalieux, est par exemple un bel espoir pour les mamans solos.
↓ Vidéo de la campagne 2023 “Monoparentalité” ↓
Les aides à Bruxelles
Au sein de la rencontre « Les mamans solos prennent la parole », les membres du projet Monopédia ont présenté leur futur répertoire d’adresses et de lieux d’aides à Bruxelles, pour soutenir les parents solos au quotidien. Il paraîtra dès le mois de janvier 2025 en version papier et numérique. En attendant, voici déjà quelques aides proposées dans la capitale.
- Parent Solo, un site web qui propose des conseils pertinents pour guider les parents solos ; une liste des principales aides disponibles à Bruxelles ; des ressources pour accompagner les parents dans chaque étape de leur vie…
- Maison des Parents Solos, un lieu d’aide, de rencontre, de refuge, d’activités parents-enfants…
- Mères veilleuses, réseau d’entraide et de solidarité entre mères monoparentales.
- Le Petit vélo jaune, service de prévention et de soutien à la parentalité.
- MIRIAM, programme d’empowerment des femmes en situation de précarité et de monoparentalité (porté par CPAS de Saint-Gilles).
- Make Mothers Matter est une ONG Internationale : « Chaque mère est en capacité de rendre le monde meilleur; elle peut assumer au mieux sa responsabilité de mère ET agir de manière spécifique sur la société dans laquelle elle vit. »
- Monopédia (Pour la Solidarité) est un projet temporaire pour réunir le secteur et créer un répertoire d’adresses ou de projets apportant de l’aide aux mamans solos.
- Hamac, bientôt rebaptisé Cabane, offre des moments de répits aux mamans solos ; « CABANE, c’est l’essence du projet HAMAC qui se poursuit via la Ligue des familles: on bâtit, on se lie, on explore, et on crée des souvenirs. »
- Label Kids Friendly, qui facilite la vie des familles monoparentales à Bruxelles.
- L’ONE a développé un document en ligne pour l’accompagnement des familles en situation vulnerabilités psychosociales.
Quand l’art peut soutenir et ressourcer
D’autres ressources plus culturelles peuvent également être sollicitées par les parents seuls avec leur(s) enfant(s) ; pour s’accorder du temps, pour parler de ce qu’on peut ressentir, pour vider son sac, pour se ressourcer…
- Théâtre CreaNova – Carole Ventura, directrice de ce théâtre était présente à la rencontre de Monopédia. Elle consacre tous ses spectacles au droit des femmes. Pour elle, la culture peut réunir et briser la solitude et les pièces proposées offrent aussi un espace de parole et de débat après chaque représentation. Pour permettre aux mamans solos de venir, les enfants sont pris en charge gratuitement et peuvent participer à des ateliers. « Car le temps pour soi est la clé pour préserver notre santé mentale », conclut la directrice.
- Podcast Paroles de Daronnes – Ce Podcast est développé par l’association ARC (Action Recherche Culturelle), par Sandrine Franceschi, maman solo également présente à la rencontre de Monopédia. Cela fait un an et demi que le podcast existe. Il se consacre aux mamans solos et est animé par les mamans elles-mêmes. Les premiers épisodes traitent des stéréotypes et préjugés, ainsi que de la douloureuse thématique du logement.
- Ateliers d’écriture à La Bellone, pour les mamans solos, par l’association La maison Le corps Le temps.
- Projet Pouce-Pousse à Jette : il s’agit ici plutôt de sport et de yoga. Les séances sont accessibles à bas prix aux mamans solos qui ont la possibilité de déposer leur(s) enfant(s) dans une garderie adjacente.
- Plusieurs livres ont évidemment été écrits sur le sujet : « Faire famille » ; « La puissance des mères » ; « Être mère » ; « Père au foyer » ; etc.
Sofia Douieb et Samuel Walheer