“C’est une victoire historique : la France est le premier pays au monde à inscrire l’IVG dans sa Constitution !”, se sont exclamés la plupart des médias français en début de semaine dernière. En cette journée des droits des femmes, le 8 mars, le symbole est d’autant plus fort. De quoi donner de l’espoir aux défenseurs des droits des femmes à travers le monde, y compris en Belgique, clairement à la traîne en la matière.
En Belgique, en effet, le débat sur la réforme de la législation sur l’avortement s’éternise depuis trop longtemps. Malgré les recommandations d’experts en faveur d’une réforme et les cris désespérés des associations féministes, les mesures concrètes tardent à être mises en œuvre. “On a une proposition de loi toujours pendante à la Chambre, donc on pourrait la voter maintenant, mais pour ça il faut une volonté politique”, souligne, à RTL, la présidente de la commission éthique des femmes francophones de Belgique, Syvlie Lausberg.
La France inscrit l’IVG dans sa Constitution
L’acte est important et symbolique en matière de droit des femmes. En inscrivant l’IVG au sein de sa Constitution – une première mondiale on le rappelle -, la France donne l’exemple et crie au monde entier de la suivre. Car il faut savoir que près de 40% des femmes en âge de procréer vivent dans des pays où l’avortement est soit extrêmement restreint, soit légal mais inaccessible en pratique. Au moment d’annoncer la nouvelle, le premier ministre français, Gabriel Attal a déclaré : “Nous avons une dette morale envers toutes les femmes qui ont souffert dans leur chair d’avortements illégaux. Le droit à l’interruption volontaire de grossesse reste en danger et à la merci de ceux qui en décident.”
Des avancées mondiales, mais des défis persistants
Ailleurs dans le monde, au cours des trente dernières années, plus de soixante pays ont entrepris des réformes législatives pour faciliter l’accès à l’avortement, reconnaissant ainsi le rôle crucial de cette pratique pour protéger la vie et la santé des femmes et des personnes pouvant tomber enceintes. En Irlande par exemple, un référendum historique en 2018 a marqué un tournant dans l’histoire législative européenne, abolissant presque totalement l’interdiction de l’avortement. On comprend mieux alors pourquoi la décision de la France d’inscrire cette interdiction dans sa Constitution est historique et unique au monde ! Pourtant, malgré ces avancées notables, de nombreux pays maintiennent toujours des lois draconiennes qui entravent l’accès à des avortements sûrs et légaux.
Appel à l’action en Belgique
“Les lois n’empêchent jamais que des avortements soient pratiqués, elles empêchent que ces derniers aient lieu dans un cadre sécurisé, ce qui a un impact non négligeable sur la morbidité et la mortalité”, souligne l’Organisation Mondiale de la Santé. Cette situation représente une violation flagrante des droits humains, privant les femmes de leur droit fondamental à disposer de leur corps et à prendre des décisions autonomes concernant leur santé reproductive. En Belgique, le cadre légal actuel a pour conséquence que des centaines de femmes sont encore obligées de se rendre à l’étranger pour réaliser une interruption volontaire de grossesse. Elles étaient 371 femmes obligées de se rendre aux Pays Bas en 2021. Pour Amnesty International Belgique, ONG qui s’est exprimée au sein d’un virulent communiqué, “II s’agit là d’une situation inacceptable à nos yeux, car le non accès à un avortement en Belgique renforce encore la vulnérabilité de femmes déjà précaires. Il est essentiel que notre pays puisse offrir aux personnes les plus précarisées un accès à un avortement de manière optimale, sans stigmatisation ni obstacles.”
Vers un droit européen à l’avortement ?
Syvlie Lausberg, présidente de la commission éthique des femmes francophones de Belgique, veut même aller plus loin dans l’action en appelant à un droit européen pour protéger les droits de toutes les femmes d’Europe. “Ce que nous voulons, c’est un droit européen, pour protéger les droits de toutes les femmes d’Europe. 40.000 femmes meurent chaque année dans le monde des suites d’un avortement non-sécurisé et des millions de femmes sont blessées à vie.” En cette journée internationale des droits des femmes, il est donc crucial de rappeler que la lutte pour l’égalité et la justice est loin d’être terminée. Chaque victoire, qu’elle soit en France, en Belgique ou ailleurs, est une étape vers un monde plus juste et égalitaire pour tous.
Sofia Douieb