Inaugurée le 21 septembre dernier par l’asbl Les Petits Riens, la Maison Parenté, troisième maison d’accueil de l’association, a déjà atteint sa pleine capacité. 16 familles monoparentales, souvent des (futures) mères avec leur(s) bébé(s), mais aussi des pères, y ont provisoirement posé leurs valises. L’équipe multidisciplinaire, composée d’assistant•e•s et travailleur•euse•s sociaux•ales et d’éducateur•rices•s, est présente pour les accompagner sur les plans juridique et administratif, ainsi que pour leur apporter répit, soutien, stabilité et autonomie. Born in Brussels s’est rendu sur place à la mi-octobre et a été accueilli, pour une visite, par Odile Dayez, directrice des Actions sociales de l’asbl Les Petits Riens, et par Charline Genot, assistante sociale à la Maison d’accueil Parenté. Reportage.
Ce matin frais d’octobre, devant un bâtiment moderne et flambant neuf, non loin de la Gare du Midi à Bruxelles, Odile Dayez, perchée sur son vélo, nous rejoignit alors que nous venions à peine d’arriver. La lourde porte en verre s’ouvrit sur une grande entrée composée d’une pièce faisant office d’accueil et d’un vaste local à vélos. La directrice des Actions Sociales des Petits Riens, son casque sous le bras, nous invita à la suivre dans un étroit couloir. Sur les murs : des affiches colorées avec le logo ‘Maison Parenté’, invitant les résidents à de multiples activités communes. Au fond à gauche, une buanderie faisait face à un espace cosy rempli de jouets d’enfants. À droite, une porte menait à une vaste cour regorgeant également de jeux. Odile Dayez nous emmena ensuite à l’étage pour jeter un œil sur un appartement encore vide au moment de notre visite. Il était tout à fait charmant et chaleureux à souhait. Une petite déco par-ci, une plante par-là ; tout semblait être mis en place pour que les familles se sentent réellement chez elles, en toute autonomie.
Premiers arrivés, premiers servis
Assises sur le canapé bleu, face à O. Dayez, nous amorcions la discussion en demandant d’entrée de jeu : « Quels sont les critères ou les conditions pour accéder à la maison d’accueil ? » Sûre d’elle et avec un débit de parole assez impressionnant, la jeune femme expliqua que les premiers arrivés furent les premiers servis, pour autant qu’ils respectaient bien les conditions. À savoir :
- Être parent solo avec enfants (ou une femme enceinte de 3 mois minimum)
- Être sans solution de logement
- Être en situation régulière sur le territoire
Cette volonté de ne pas trier les candidatures selon l’urgence des situations semblait pleinement assumée. Selon Odile Dayez, « Certaines situations, bien que moins urgentes que d’autres, méritent aussi d’être prises en considération. »
Du collectif vers l’individuel, la clé du succès ?
Tout juste à la fin de sa phrase, la porte du petit appartement s’ouvrit et Charline Genot, assistante sociale, entra. Elle nous salua et s’assit sur la table de la salle à manger. Prenant la conversation en marche, elle nous éclaira plus spécifiquement sur la vie dans la maison. « De nombreuses activités communes sont organisées et les familles s’entraident pour la garde des enfants ou autre. Certains repas sont partagés et une réunion communautaire obligatoire est organisée une fois par mois. En outre, une fois pas semaine au moins, nous venons voir les familles pour avancer dans leur suivi et s’assurer que tout aille pour le mieux. Ces visites ne sont pas intrusives et assez réduites pour préserver intimité et autonomie. Mais on se rend parfois compte qu’elles sont réellement nécessaires. » Et Odile Dayez d’ajouter : « Ce que nous souhaitons faire pour sortir définitivement ces familles du sans-abrisme, c’est de leur offrir un soutien collectif et communautaire, tout en leur permettant d’être aussi indépendantes que possible ; je suis persuadée que c’est la clé du succès. D’ailleurs, avec l’UCL, Les Petits Riens viennent justement de lancer une étude sur cette articulation entre le collectif et l’individuel afin de sortir les sans-abris de la rue. »
« Déjà trois naissances en nos murs ! »
« Trois naissances ont déjà eu lieu en nos murs et neuf petits berceaux ont été installés ! », s’exlama Charline Genot quand nous lui demandions si beaucoup d’enfants en bas-âges avaient rejoints la maison d’accueil. Les mamans hébergées étaient apparemment toutes vulnérables, souvent victimes de violences conjugales et ayant dû fuir leur domicile. Au rez-de-chaussée, une salle dédiée aux touts-petits (que nous avions visité à notre arrivée) a été pensée pour recréer du lien entre les mamans et leurs bébés, ainsi que pour favoriser le partage entre les mamans. « Parfois, il faut vraiment être vigilants vis à vis de certaines femmes et leur apporter un soutien plus poussé », expliqua encore C. Genot. « Je pense notamment à cette très jeune maman qui semble ne pas s’en sortir du tout avec son petit garçon de deux ans. Nous avons malheureusement constaté de la négligence et nous faisons tout pour trouver une solution avec elle. »
Maison « dad’s friendly »
Dans le couloir, Odile Dayez nous rappela que 16 familles étaient déjà hébergées à la Maison Parenté, soit 30 enfants et 15 adultes. Parmi ces familles, quatre étaient composées de papas seuls avec un ou plusieurs enfants. La directrice des Actions Sociales précisa que la nouvelle maison d’accueil est la seule avec, comme public, les familles monoparentales. Dans la population, les papas seuls avec enfants représentent 15% des parents solos. À la Maison Parenté, ils représentent 27 % des personnes logées. Lorsque nous sommes arrivés dans la magnifique salle commune baignée de soleil, tout en haut du bâtiment, O. Dayez nous parla notamment d’un papa dont le fils est autiste et qui était sur le point de perdre pied. L’équipe se démenait pour trouver avec lui une école où le scolariser, ainsi que des activités extra-scolaires à lui faire faire…
Au lieu du provisoire, créons du définitif !
Cette Maison est évidemment une aubaine pour ces familles monoparentales qui se voient offrir un toit, de l’accompagnement personnalisé et du répit pour une durée fixée à neuf mois (variable selon les cas). Dans ce laps de temps, l’équipe pluridisciplinaire espère trouver une solution pour que ces familles soient orientées vers un lieu plus définitif. L’asbl Les Petits Riens est justement sur le point de construire un ensemble de logements sur le même modèle. « Les appartements seraient individuels avec toute l’autonomie nécessaire, mais que des espaces communs et des activités seraient organisées à part, dans une salle dédiée… » concluait la directrice des Actions Sociales de l’asbl en nous raccompagnant vers la sortie.
Sofia Douieb