Chaque année, Aquarelle soutient environ 500 (futures) mères en grande précarité. L’association a fêté, en novembre dernier, ses 25 ans d’existence ; soit quelque 7 200 familles ayant bénéficié de son accompagnement. Au sein d’un court-métrage de 15 minutes, Aquarelle retrace son histoire et rend hommage à toutes les équipes de sages-femmes, gynécologues, pédiatres, assistantes sociales… qui se sont relayées durant toutes ces années.
L’objectif d’Aquarelle est d’offrir un soutien médico-social aux femmes enceintes ou ayant accouché, souvent issues de l’immigration, sans couverture de sécurité sociale et vivant dans une grande précarité. Cet accompagnement se déroule au CHU Saint-Pierre ou à domicile par des équipes mobiles, avec pour objectif de les aider avant, pendant et après leur grossesse. L’association agit ainsi dans une démarche à la fois préventive et curative et joue ensuite un rôle de relais vers les consultations pour nourrissons afin d’assurer le suivi des bébés.
Sans mutuelle et en grande précarité
Rachel Gourdin, sage-femme et membre de l’asbl, s’est confiée au micro de BX1, pour présenter l’association, ses conditions d’accès et les principales difficultés rencontrées : “Pour accéder aux services d’Aquarelle, les femmes enceintes qui se présentent doivent être sans mutuelle en cours et en situation de grande précarité. Malheureusement, c’est assez fréquent. Il faut les encadrer au mieux et leur permettre de trouver un peu de répit chez nous. Les besoins sont en constante hausse et notre assistante sociale doit aussi les aider pour la recherche d’un logement ou le suivi administratif ; ce qui n’est pas toujours simple sachant que 49% des femmes qui viennent chez nous sont confrontées à la barrière linguistique. Heureusement, nous pouvons faire appel à des traducteurs de l’hôpital.”
La genèse du projet
“À la fin des années 90, on a constaté une recrudescence de femmes enceintes qui venaient dans notre maternité, à l’hôpital Saint-Pierre, sans jamais avoir eu de suivi médical auparavant”, explique Linda Doeraene, co-fondatrice d’Aquarelle et sage-femme, au début du petit reportage réalisé pour les 25 ans de l’association. Elle continue : ” Une fois que ces femmes accouchaient, elles voulaient vite repartir parce qu’elles avaient peur de la facture qui allait arriver”. C’est ainsi que les chefs de services ont suggéré à deux sages-femmes, dont Linda, de créer une association permettant à ces futures mamans d’être suivies et accompagnées gratuitement au cours de leur grossesse. Il a parfois fallu aller les chercher chez elles, leur assurer une certaine discrétion pour qu’elles leur fassent confiance ; pour s’assurer de ne pas être dénoncées aux autorités… “L’originalité du projet, c’était qu’on assurait un suivi intra- et extra-hospitalier, qui assurait à la fois la prévention et le curatif au profit de la dyade mère-enfant”, ajoute Martine Vanderkam, l’autre sage-femme à la base d’Aquarelle.
↓ Visionner, dans son intégralité, la vidéo des 25 ans d’Aquarelle ↓
Une association en constante évolution
Au fil des ans, l’asbl a dû se confronter à des manquements qu’il a fallu combler petit à petit. D’un point de vue matériel par exemple, les femmes suivies avaient besoin d’habits pour elles et leur bébé. Une garde-robe a ainsi été créée et est agrémentée par des dons ; le matériel de puériculture est stocké dans un autre local auquel les patientes peuvent également avoir accès (entièrement géré par des bénévoles). Même chose pour les dons alimentaires ou même pour l’aide financière. Pour ce dernier point, rechercher des structures capables de donner des fonds au projet s’avéra essentiel ; c’est ainsi que l’hôpital Saint-Pierre, Kind&Gezin (dans les premières années seulement) et l’ONE ont contribué à renflouer les caisses. Un travail en réseau a également été mis en place pour offrir une approche plus holistique des soins. Car il s’agit aussi de prendre soin du mental, du bien-être, de la préparation à l’accouchement…
Des valeurs humaines avant tout
Sécurité, bienveillance, écoute, égalité, disponibilité, respect… sont autant de valeurs véhiculées par l’association. Il est surtout question de leur redonner confiance en la société et surtout en elles-mêmes ; pour qu’elles se sentent bien dans leur rôle de maman et qu’elles puissent enfin prendre leur envol, mieux armées pour ce monde. “C’est difficile au quotidien, car les situations des femmes sont dramatiques, mais c’est aussi beaucoup de bonheur de pouvoir les aider et les soutenir au quotidien”, se confie finalement Linda. “J’ai vraiment fait ce travail à Aquarelle avec tout mon cœur, toute mon âme, et ça a vraiment fait de moi une femme heureuse ! J’espère qu’on pourra encore aider de nombreuses familles à l’avenir, avec une équipe encore plus riche.”
À partir du 1er janvier 2025, le vaccin contre le virus VRS (Abrysvo) sera également remboursé pour les femmes enceintes. Administré à la future maman pendant la grossesse, ce vaccin, déjà gratuit pour les nourrissons, lui permet de produire des anticorps qui la protègent, elle et son bébé, contre le VRS (ou bronchiolite).
Il y a encore trop de bébés qui sont contaminés par le VRS dans notre pays. Et nous constatons surtout que le nombre d’hospitalisations baisse considérablement lorsque la mère est vaccinée ou lorsque le bébé reçoit le médicament Beyfortus contre le VRS , explique Frank Vandenbroucke au sein d’un communiqué. Chaque hiver, les hôpitaux sont sous pression en raison des nombreuses infections respiratoires. En remboursant désormais le vaccin, non seulement nous protégeons les tout petits, mais nous réduisons aussi la pression qui pèse sur nos soins. »
{Communiqué de presse de Frank Vandenbroucke}
Principale cause d’infection des voies respiratoires chez les jeunes enfants
Le virus respiratoire syncytial, ou VRS, est la principale cause d’infection des voies respiratoires chez les jeunes enfants. Il survient principalement au cours de la première année de vie de l’enfant et, dans les cas graves, il peut entraîner une hospitalisation, voire la mort. En Europe, le virus circule généralement en hiver (la période d’octobre à mars). Chaque année, Sciensano enregistre environ 7 000 cas d’infection par le VRS dans notre pays. La plupart des enfants sont infectés pendant leur première année de vie. Chez les enfants de moins de deux ans, le VRS peut évoluer en pneumonie ou en bronchiolite.
Le Conseil supérieur de la Santé soutient la prévention du VRS
En mars 2023, le ministre Frank Vandenbroucke a demandé au Conseil supérieur de la Santé de formuler des recommandations sur l’utilisation d’anticorps contre le virus VRS. En raison de la charge de morbidité élevée chez les nourrissons et de la gravité de l’infection, le Conseil supérieur de la Santé soutient la prévention du VRS pour tout nourrisson de moins d’un an :
Soit en utilisant le vaccin maternel (ABRYSVO) pour les femmes dont l’accouchement est prévu pendant la saison du VRS (de septembre à mars). Le Conseil supérieur de la Santé considère la période de 28 à 36 semaines de grossesse comme l’intervalle recommandé pour la vaccination de la mère.
Soit en administrant le médicament Beyfortus aux bébés nés de mères non vaccinées ou nés prématurément (<30 semaines de grossesse) ou dans les deux semaines suivant l’administration du vaccin pendant la grossesse.
Un vaccin déjà gratuit pour les bébés
Cet été, le ministre Vandenbroucke avait déjà décidé de rembourser le médicament préventif contre le VRS pour les bébés. Les bébés dont les mères ont été vaccinées contre le VRS sont protégés en même temps que leur mère et ils ne doivent donc plus recevoir de médicament préventif dans ce cas. C’est précisément pour cette raison qu’il est important que les femmes enceintes bénéficient du remboursement du vaccin maternel à partir du 1er janvier 2025, dans le cas où elles accoucheraient pendant la saison du VRS. De cette manière, une possibilité de prévention supplémentaire est rendue accessible au plus grand nombre. Néanmoins, pour cette même raison, nous faisons aussi en sorte que les autorités ne remboursent qu’un seul traitement : le vaccin contre le VRS pour la mère ou le médicament pour le bébé.
Depuis six ans maintenant, Bliss Stories, un concept basé en France, donne la parole aux femmes qui se livrent sans filtre ni tabou, à travers leur récit de maternité et leur trajectoire de mères. Grâce à des podcasts, articles ou autres contenus, les (futures) mères peuvent trouver, sur Bliss, de multiples ressources. Et la formule marche, puisqu’elles sont plus de 260 000 à suivre le compte Instagram. Récemment, un volet sexualité a été ajouté au site web, pour compléter encore un peu plus les sujets abordés, sans plus aucun tabou du tout.
Bliss Stories est né en 2018 d’un constat saisissant : “Le manque immense d’informations concernant la (in)fertilité, la grossesse, l’accouchement, le post-partum et toutes les façons possibles de faire famille.” C’est ainsi que Clémentine Galey, initiatrice du projet et maman de deux enfants, a commencé, au sein d’un podcast, a donné la parole à celles qui ont choisi de partager leur histoire.
Ici, on raconte tout, on ne s’interdit rien. Ici, on écoute avec le cœur. Ici, on libère la parole. Ici, on partage le savoir.
Le 1er podcast sur la maternité
À travers des témoignages authentiques et sans filtre (267 au moment d’écrire l’article), Clémentine Galey recueille les récits de femmes sur leur grossesse et leur maternité, dans le but de conseiller, de rassurer, de créer des liens et surtout, de déculpabiliser. Ce podcast propose un regard réaliste et sans tabou sur la grossesse et la parentalité, en offrant des détails qu’on aurait aimé connaître plus tôt, des récits honnêtes qui préparent et informent avant, pendant et après l’arrivée d’un bébé. Un espace de partage pour tous les parents, où les conseils et témoignages se croisent pour mieux appréhender cette aventure. En six ans, ce podcast – et les multiples projets qui l’accompagnent – a rencontré un succès tel qu’il s’est rapidement hissé à la première place. Avec ses 260 000 abonnés sur Instagram et ses écoutes records par épisode, il n’est pas prêt d’être détrôné. D’autant plus que le projet se renouvelle sans cesse et qu’un nouveau podcast « Bliss Hot Stories » sur la sexualité des femmes a vu le jour récemment.
Information périnatale variée
Au sein du podcast, du site web, du livre, du spectacle (parce que Bliss Stories, c’est aussi ça), plusieurs questions clés reviennent sur le tapis : « Qu’y a-t-il de plus hallucinant que de voir le corps d’une femme en fabriquer un autre ? Le chemin peut être long pour tomber enceinte, alors comment savoir quelles sont toutes les possibilités pour faire ce bébé ? Le passage en salle de travail et ce qui s’y passe précisément restent une énigme pour beaucoup, mais où trouver des infos concrètes ? Qu’est-ce qui, dans une vie, procure plus de frissons que le moment où des parents posent les yeux pour la première fois sur leur bébé ? Existe-t-il un moment plus exceptionnel que celui de la naissance ? » Et les réponses affluent des mères elles-mêmes (des pères aussi parfois, comme dans un des derniers épisodes avec Julien Doré). Du contenu informationnel apporte également des pistes de « solutions » au sein du blog et aussi du livre Bliss Stories sorti en 2020.
Bien sûr, Bliss Stories est loin de proposer le seul podcast sur la maternité. Autant en France qu’en Belgique, le sujet fait écrire, parler et réagir. Il faut dire que la maternité, la parentalité ou encore la périnatalité concernent (ou ont concerné un jour) une bonne majorité de la population.
Le 13 novembre dernier, l’hôpital Erasme inaugurait la nouvelle maternité de son service de gynécologie-obstétrique. L’événement comprenait une présentation du service, ainsi que l’inauguration officielle et la visite de la maternité. L’équipe de Born in Brussels était présente pour immortaliser ce moment, en images et en mots.
Dans un communiqué, l’Hôpital Erasme se réjouit : “Nous proposons désormais, au sein de la nouvelle maternité, 24 chambres, toutes individuelles, pour favoriser l’intimité et le calme dont les mamans et leur bébé ont besoin. Plus de la moitié des chambres a fait l’objet d’une rénovation soignée, conçue pour permettre l’accueil d’une personne accompagnante invitée à participer aux soins du nouveau-né et de sa maman tout au long de leur séjour à la maternité.” Une maternité flambant neuve qui accueillera les mamans et leur(-s) bébé(-s) à partir du lundi 18 novembre 2024.
Nos pratiques et manières de concevoir les soins évoluent constamment selon la demande des femmes afin de répondre à leurs besoins. Ces chambres individuelles permettent de respecter le rythme de chacune ».Clotilde Lamy, Directrice de la Clinique Obstétrique de l’Hôpital Erasme – H.U.B
Un moment fort dans l’engagement pour les familles
Le corps hospitalier, ainsi que le bourgmestre d’Anderlecht étaient présents à cette inauguration plus que réjouissante. Avant de couper le ruban symbolique, Fabrice Cumps a notamment remercié les autorités de la ville et de la commune, de continuer à investir dans ce genre de projets et de répondre aux besoins de la population. Le directeur de l’H.U.B, Francis de Drée, a quant à lui souligné qu’il s’agit d’un moment fort dans l’engagement pour les familles. La nouvelle maternité est un lieu où chaque famille se sentira entourée, entre “innovation et chaleur humaine”.
Le respect du rythme et du choix de la patiente
Place ensuite à l’intervention d’Anne Delbaere, directrice du Service de Gynécologie-Obstétrique à l’hôpital Erasme. Elle explique : « Notre nouvelle maternité renforce l’excellence de l’accompagnement multidisciplinaire de nos patientes en offrant un environnement chaleureux aux mères pour entourer les premiers jours de vie de leur bébé ». Et effectivement, l’équipe de Born in Brussels a trouvé l’espace accueillant, serein et calme. Pour elle, cela permettra également d’attirer plus de femmes à accoucher dans cet hôpital (2.000 accouchements par an pour le moment, et 1 naissance bruxelloise sur 10 qui a lieu à Erasme). La directrice de la clinique d’obstétrique, Clotilde Lamy, a également venté les mérites de ce lieu rénové et repensé. L’idée – déjà avant cette inauguration – est de limiter les interventions médicales, parce que le respect du rythme et du choix de la patiente est au centre des préoccupations. Les sages-femmes sont à l’écoute pour qu’une réappropriation du corps des femmes puisse s’établir. Tout en gardant une qualité optimale des soins, grâce, notamment à la concertation systématique entre les acteurs de l’hôpital.
Quelques innovations importantes
La préparation à la naissance est primordiale pour anticiper l’autonomie de la femme ; et en particulier pour les femmes vulnérables avec des besoins particuliers. C’est pourquoi, dès janvier, il y aura un bureau dédié au choix d’option de naissance où les femmes seront accueillies et orientées. Car la manière d’accoucher peut réellement faire la différente ; tout comme le lieu choisi. Clotilde Lamy insiste ainsi sur le fait que l’hôpital doit leur offrir la possibilité d’accoucher dans les meilleures conditions (même si elles ne sont pas éligibles pour le Cocon par exemple). Il existe aussi l’option du plateau technique accessible aux sages-femmes extérieures.
Autre innovation : la “zéro séparation”. Isaline Gonze, sage-femme et cheffe de service du pôle mère-enfant, prend la parole : “Nous ne voulions plus séparer la mère de son enfant et c’est pourquoi nous avons créé une maternité basée sur la zéro séparation. Ça demande une structure particulière de pouvoir soigner la dyade là où elle se trouve ; souvent à l’endroit où le plus faible des deux doit être hospitalisé”. Un projet qui devrait aboutir très bientôt (bien que cela existait déjà, sans être officiel pour autant).
24 chambres à l’ambiance plus sereine
Place ensuite à la visite de la maternité. Toutes les chambres sont désormais situées au même étage, niveau 2 route 328, et à proximité de l’hospitalisation prénatale pour les grossesses à haut risque (Maternal Intensive Care) et des salles d’accouchement, ce qui facilite le suivi par le personnel soignant. Laura Cuypers, la sage-femme et responsable de la maternité, s’est exclamée, en s’arrêtant devant l’une des chambres aux tons bleu et gris : “Les locaux sont très beaux avec une ambiance plus sereine”. Ce sont des chambres seules, mais avec différents standings. Ce qui permettra une meilleure autonomie, plus d’intimité et une sortie plus rapide et en confiance de l’hôpital. “On constate aussi que les bébés sont plus calmes en chambre seule”, insiste la sage-femme. Certainement grâce aux passages réduits dans les chambres, aux visites moins nombreuses… “Le projet ravive toutes les flammes donc on est ravi !”
Ce jeudi 7 novembre 2024, les sages-femmes (et plus généralement les travailleurs.euses du secteur du non marchand) sortent dans la rue pour crier leur mécontentement. Car, depuis plusieurs années déjà, elles ont “ras le col”, pour reprendre les mots du slogan brandi au sein des manifestant.e.s. La couleur à l’honneur est le rose fushia, à porter en soutien au mouvement. Il s’agit aussi de scander plusieurs revendications, adressées directement aux nouveaux décideurs politiques : “Deux patient.e.s prise.e.s en soins pour le prix d’un.e ! Les sages-femmes ne sont pas en solde !” ; “Mieux communiquer entre prestataires de périnatalité ? Un dossier périnatal partagé et uniformisé !” ; “Travail de week-end = tarif de week-end, aussi après le 5e jour !” ; “Ouvrir un dossier, c’est du temps d’écoute, d’analyse, d’encodage ; ça mérite d’être rémunéré !” ; “237 euros bruts pour 5 semaines de garde et tout un suivi de travail primipare ? Vous le feriez ?”.
Le 23 octobre dernier, l’Association Francophone des Sages-femmes (AFSF) et l’Union professionnelle des Sages-femmes belges (UpSfb) avaient déjà lancé les hostilités, s’indignant au sein d’une carte blanche intitulée “Les sages-femmes sont toujours à bout de souffle” (en référence à la carte blanche de l’an dernier). Là voici dans son intégralité.
“Il y a un an tout juste, les sages-femmes étaient en colère et interpellaient Mr Vandenbroucke, ministre de la santé ! Une carte blanche qui avait obtenu plus de 3 000 signatures en Fédération Wallonie Bruxelles et plus de 5 000 en Flandres fin 2023, reprenait les différents points de leur mécontentement. Le ministre Vandenbroucke leur avait alors fait miroiter un changement pour
la profession ! Elles pourraient revoir la nomenclature et les 11 millions qui devaient refinancer leur secteur, (mais qui ont finalement servi à financer un trajet de soin périnatal) devaient en grande partie leur être réservé au sein de ce trajet.
Aujourd’hui, où en sommes-nous ?
Le ministre Vandenbroucke nous a en effet permis d’organiser des groupes de travail pour réfléchir à la révision de la nomenclature, mais force est de constater qu’il ne suffit pas de secouer l’enveloppe pour la faire grossir et cette enveloppe est définitivement trop petite pour le secteur. Dans le rapport de 2022, résultats du couplage des données PlanCad SPF SPSCAEDatawarehouse MT&PS-INAMI, réalisée sur base du marché de travail pour les sages-femmes en 2019, on constate qu’un emploi d’indépendante à temps plein pour la nomenclature des sages-femmes est assimilé à un montant brut de 24.977€ dans le cadre de la nomenclature spécifique aux sages-femmes contre un montant brut de 75.781€ pour un emploi d’indépendante à temps plein dans la nomenclature en art infirmier.
Les sages-femmes ne demandent plus seulement une rémunération qui leur permettrait d’être reconnues à hauteur de leurs responsabilités, aujourd’hui elles demandent une rémunération qui leur permettrait de survivre ! Le secteur a subi, années après années, des restrictions budgétaires permettant de financer différents projets dans lesquels elles n’ont même pas été impliquées, ne fut-ce que par courtoisie.
Le remodelage des accompagnements autour de la périnatalité, notamment avec les retours précoces, les trajets de soins, l’informatisation forcée… a augmenté la précarité de leur profession, les obligeant à rejoindre la première ligne sans le financement nécessaire pour le faire. Elles se sont adaptées, ont assuré les meilleurs soins possibles auprès des familles, malgré la réalité peu glorieuse de leur compte en banque. Elles ont repoussé les limites de la décence encore et encore pour répondre à leurs valeurs de bienveillance, d’accessibilité pour tous ! Alors, lorsqu’on leur demande de justifier la plus-value d’un refinancement de leur secteur pour les familles, elles restent bouche bée, car en effet, il n’y a pas de plus-value possible, elles ont tout donné !
À l’inverse, la question devrait être « quelle serait la moins-value sans refinancement ? ». Là, elles peuvent être beaucoup plus loquaces. Sans refinancement, leur secteur ne peut plus tenir pour garantir la qualité des accompagnements ! Elles seront alors contraintes d’actionner d’autres leviers et c’est le citoyen qui devra financer de manière plus importante ses soins.
À l’impossible nul n’est tenu
Il est temps de voir les choses en face, la sage-femme est une professionnelle de première ligne, détentrice d’un baccalauréat, qui possède toutes les compétences nécessaires pour maintenir la santé des femmes et de leurs enfants durant toute la période de périnatalité. Elle est formée de manière continue, elle fait de la prévention, soutient la physiologie et dépiste la pathologie. Elle travaille en collaboration avec les professionnels de la périnatalité (gynécologues, pédiatres, médecins généralistes, ONE…) afin d’assurer un suivi des familles en suivant les dernières recommandations et données de la science.
Mais ce sont aussi les seules professionnelles de la santé qui ne peuvent facturer qu’une seule personne alors qu’elles prennent en soins au moins deux personnes en postnatal, la maman et le bébé ! Si un professionnel de la santé voit deux ou trois patients, il facturera 2 ou 3 attestations. Si la sage-femme se rend chez une maman en post-partum, que cette maman ait un, deux ou
trois enfants, la sage-femme réalisera les soins à la maman, et à chacun des nouveau-nés, mais ne pourra facturer qu’une seule et même attestation. Rien ne justifie, à ce jour, la différence de traitement qui existe entre la façon dont l’ensemble des praticiens professionnels (art de guérir, art infirmier et paramédical) sont rémunérés lorsqu’ils reçoivent plusieurs patients d’une même famille en consultation et la façon dont les sage-femmes se voient rémunérer.
Nous ne pouvons plus l’admettre
Et c’est là un exemple de nos revendications pour une meilleure condition de vie. Actuellement, la réponse à toutes leurs revendications est inlassablement la même : « Aucun budget n’est disponible pour leur secteur ».
Le paysage politique pour le prochain mandat semble se dessiner doucement, et avec lui, des propositions bienveillantes sont mises sur la table : accentuer la prévention, privilégier l’éducation à la santé, rendre les soins plus accessibles quel que soit le statut social des patients… et même veiller à la reconnaissance des soignants. Si toutes ces bonnes intentions tentent de nous rassurer, elles nécessitent également un budget à la hauteur des besoins et des enjeux.
Pour le comité d’assurance de l’INAMI, l’heure n’est pas au financement, mais à l’économie ! Un dépassement dangereux du budget dans certains secteurs fait vaciller notre sécurité sociale, le ministre Vandenbroucke a tiré la sonnette d’alarme… La mécanique est en marche, il faut alléger le budget !
Où va-t-il falloir encore raboter avant que l’édifice ne tombe ?
Il n’y a pas de bonne réponse, c’est tout le secteur de la santé qui frissonne. Même si chacun dispose de tous les arguments nécessaires pour justifier un refinancement, il y a un secteur qui sort du lot et qui agonise depuis longtemps : celui des sages-femmes. Nous ne pouvons pas accompagner les familles de manière optimale si nous devons en même temps lutter pour notre survie ! Dans un nouveau gouvernement, riche de nouvelles énergies, de nouvelles stratégies, nous pouvons espérer que la place donnée à la santé des femmes et des familles sera une priorité. Car, en effet, les nouveau-nés d’aujourd’hui seront les adultes de demain et mieux vaut miser sur une société en santé.
Pour toutes les sages-femmes qui vont au-delà de leurs limites ; pour toutes les femmes qui souffrent de ne pas être soutenues, entendues ; pour tous ces nouveau-nés qui arrivent dans un monde bien rude.